Manifestation devant la Cour suprême à Londres, le 17 septembre 2019, pour protester contre la fermeture du Parlement du Royaume-Uni, décidée par le Premier ministre Boris Johnson © AFP Tolga Akmen
La Cour suprême du Royaume-Uni examine à partir de mardi le bien-fondé de la suspension controversée du Parlement, voulue par le Premier ministre Boris Johnson et vivement critiquée par ses opposants comme une manœuvre visant à imposer un Brexit sans accord.
La Cour doit examiner l’affaire durant trois jours mais la date du jugement n’est pas connue.
Si, à l’issue de ce nouvel épisode dans la saga chaotique du Brexit, la Cour suprême juge la suspension illégale, le Parlement devra être immédiatement rappelé, selon des experts en droit.
« La meilleure chose que l’on puisse faire est attendre et voir ce que les juges disent », a déclaré à la BBC Boris Johnson, qui réunit les membres clefs de son gouvernement mardi matin. Il a assuré vouer « le plus grand respect au (pouvoir) judiciaire ».
« Nous devons voir ce que seront les termes précis de la décision et ce qu’ils signifient », a indiqué le ministre de la Justice Robert Buckland. Avant d’ajouter sur la chaîne Sky News : « Nous respecterons la décision des tribunaux ».
A 44 jours du divorce prévu avec l’Union européenne, le scénario d’un Brexit sans accord reste ouvertement envisagé par Boris Johnson malgré certaines prévisions alarmantes, établies par son propre gouvernement, de pénuries alimentaires, de médicaments et de risques de troubles publics.
Une majorité de députés s’oppose à une sortie sans accord de l’UE et veut annuler la suspension du Parlement, prévue jusqu’au 14 octobre, afin d’avoir plus de temps pour bloquer un « no deal ». Ils ont déjà réussi à voter une loi obligeant Boris Johnson à demander à l’UE un report de trois mois du Brexit, prévu le 31 octobre – même si le Premier ministre a exclu de demander ce délai.
– Trois jours –
Sous le feu des critiques de la classe politique comme de la société civile, la prorogation du Parlement a fait l’objet de plusieurs actions en justice aux verdicts opposés.
Le 11 septembre, la plus haute instance civile d’Ecosse a jugé la suspension « illégale » car elle avait selon elle pour objectif d' »entraver le Parlement ».
Au contraire, répondant à la plainte d’une activiste anti-Brexit, Gina Miller, la Haute Cour de Londres a refusé de se prononcer sur le fond, estimant que la prorogation — une décision « politique » — ne relevait pas des tribunaux.
Renvoyés en appel, les deux jugements sont examinés devant la Cour suprême à Londres à partir de 09H30 GMT pendant trois jours. Une vingtaine de personnes manifestaient mardi avant l’ouverture de l’audience devant la Cour, réclamant la réouverture du Parlement.
La première journée d’audience sera consacrée à l’exposé des avocats des plaignants: dans un cas Gina Miller, et dans l’autre 78 parlementaires pro-européens, conduits par Joanna Cherry, députée du parti nationaliste écossais SNP.
La défense du gouvernement répondra mercredi tandis que l’ancien Premier ministre conservateur John Major, qui soutient Gina Miller, sera entendu le troisième jour de l’audience. D’autres intervenants prendront la parole.
– « Pratique déloyale » –
De son côté, l’ex-Premier ministre David Cameron, qui avait convoqué le référendum sur le Brexit, a dénoncé une « pratique plutôt déloyale » mais « pas illégale ». « Au bout du compte, on doit travailler avec le Parlement et on ne peut pas nier son arithmétique ni les majorités en son sein », a-t-il argumenté dans une interview à la chaîne ITV.
Boris Johnson a perdu sa majorité absolue à la Chambre des communes, sa stratégie du Brexit ayant abouti à une « rebellion » de députés conservateurs qui ont du coup été expulsés du parti tory.
Il affirme désormais miser sur un accord de divorce avec l’UE avant un Conseil européen des 17 et 18 octobre à Bruxelles.Mais la commission européenne a relevé lundi qu’aucune proposition en vue d’une solution opérationnelle n’avait encore été présentée par son gouvernement.
LNT avec Afp