S’il est un domaine où les choses vont lentement, très lentement, c’est bien celui du Législatif !
Sans parler de la « tarte à la crème » que constitue l’approbation du projet de loi sur le droit de grève, qui hante les couloirs du Parlement depuis plus de cinquante ans (!!!), on se bornera seulement à évoquer le projet de Loi-cadre sur l’Éducation.
Celui-ci, en effet, objet de polémiques féroces, vient tout juste de réussir son passage devant la Commission l’Enseignement, de la Culture et de la Communication à la Chambre des Représentants, après trois années et demies de blocages générés et entretenus par les forces les plus rétrogrades de notre pays.
Bien évidemment, tout le monde en connaît la cause, qui n’est autre que la nécessité de délivrer certains enseignements, dans les matières scientifiques, en langues étrangères, c’est-à-dire le français et l’anglais.
Nos valeureux députés du PJD, soutenus par les non moins valeureux parlementaires de l’Istiqlal, ont mené, jusqu’au dernier moment, un combat d’arrière-garde contre les articles de ce projet de loi.
Double face et volte-face
On retiendra que l’Article 2, qui prévoit l’alternance linguistique, a été voté par douze parlementaires seulement sur les trente présents, deux voix contre et seize abstentions, tandis que l’Article 31, qui organise l’enseignement des matières scientifiques en langues étrangères, a recueilli les mêmes scores.
C’est donc, clairement, que la majorité des membres de la commission en question n’a pas approuvé deux articles parmi les plus importants de ce projet de Loi-cadre et ce comportement, éminemment politique, mérite quelques commentaires.
Le Parti Justice et Développement, qui préside aux destinées gouvernementales, et qui, en tant que tel, a approuvé au sein de l’organe exécutif ce texte de loi, véritablement fondamental et stratégique, a, dans le même temps, exposé à l’opinion publique nationale ses réticences, voire son refus d’un tel projet.
Celui-ci, pourtant, à tout le moins, engage les décideurs publics à mieux préparer la formation des millions de jeunes Marocaines et Marocains en leur assurant une connaissance minimale des langues étrangères, utiles pour leur avenir.
On comprend ainsi, à travers la bronca des élus PJD, que ses représentants au gouvernement ont eu une démarche opportuniste, sachant que ledit texte avait été approuvé en Conseil des Ministres présidé par le Roi Mohammed VI.
Car le PJD clame à qui veut l’entendre qu’il est un parti organisé et que ses troupes sont fidèles et disciplinées…
Mais en réalité, M. El Othmani, patron de cette formation et chef du gouvernement, ne peut engager ses parlementaires qui, pendant plusieurs années, ont fait de l’obstruction diligente et obtuse sur la question de la pluralité linguistique.
Est-ce donc une démarche concertée et acceptée discrètement par la haute hiérarchie du PJD ou une fronde incontrôlable ?
On optera, sans hésiter pour la première hypothèse !
Nizar et les vieux birbes
L’autre constat qu’exprime le vote, ou plutôt les abstentions de plusieurs parlementaires, vise le parti de l’Istiqlal, balancé entre les convictions « intelligentes » et passablement modernistes de son secrétaire général, M. Nizar Baraka, et les positions passéistes de ses élus et compagnons, porte-drapeaux du conservatisme nationaliste…
Nonobstant le fait que le texte approuvé en Commission ad hoc devra revenir en plénière à la Chambre basse avant de migrer chez les Conseillers, ce qui n’exclut nullement de nouvelles obstructions, le PJD et l’Istiqlal adressent ainsi des signaux très clairs à nos concitoyens, à quelques mois de plusieurs échéances électorales.
Ces deux formations, qui, en fait, ne sont pas si éloignées l’une de l’autre en termes de référentiels, expriment ainsi un parti-pris délibéré et assumé pour les options les plus conservatrices et rétrogrades en matière d’Enseignement.
Or, l’enseignement est littéralement, le lit, la base, la pierre fondamentale de l’avenir de nos enfants, non pas ceux qui bénéficient de l’accès aux passerelles privilégiées de l’enseignement privé grâce à des parents argentés, mais les millions d’autres, c’est-à-dire les fils et les filles du peuple marocain, à qui le PJD et l’Istiqlal, au nom d’idées fumeuses et obsolètes, veulent interdire l’accès à la Connaissance universelle, à la Science, aux nouvelles technologies, à l’heure de la révolution digitale.
Ces prises de position ne devront pas être oubliées à l’heure de la reddition des comptes électoraux !
Et déjà, bien avant le début des campagnes et des échéances, le camp de la Modernité et du Savoir est bien délimité face à celui de l’Obscurantisme et de la stagnation !
Fahd YATA