L’opération de privatisation de 8% du capital de Maroc Télécom, n’est pas la première du genre pour la société cotée!
En effet, il y a eu une première étape dans la privatisation de Maroc Télécom, (MT), en faveur de Vivendi, opérateur français, lequel a cédé à Ettissalat, l’opérateur émirati, à travers sa holding société de participations, qui n’est pas un partenaire financier, mais l’un des plus importants opérateurs télécom de la région.
Entre Vivendi et Maroc Télécom, il y avait certainement un pacte d’actionnaires qui continue avec Ettissalat.
Ettissalat , l’émirati, avec plus de 50% du capital de MT, est le gestionnaire de l’opérateur téléphonique historique du Maroc. Et, l’opération de cession de 8% de la participation de l’État n’engendrera aucun changement dans la gouvernance de MT.
Ces précisions s’imposent du fait que lors de la cession de 6% du capital de MT sur le marché de blocs, le RCAR et la CMR, les deux institutionnels souscripteurs affiliés à l’État, ont cumulé à eux deux les 2/3 de l’attribution de l’opération, soit 4 milliards sur 6 milliards.
Or, il s’avère que la baisse de la participation de l’État dans le tour de table de MT ne diminue en rien son poids dans sa gouvernance.
Car, des accords initiaux, prévoyaient que l’État marocain pouvait céder une partie de sa participation dans la limite d’un certain seuil qui n’est pas encore atteint, sans aucun impact sur la gouvernance.
D’autant, qu’interrogé sur la question de la prédominance des deux institutionnels en question dans l’opération de cession de gré à gré, un des co-conseillers explique ces résultats de façon technique :
La cession de 8% de MT, représentant 9 à 10 milliards de dirhams au cours de bourse, s’avérait être la plus grosse opération jamais réalisée sur le marché marocain. Et, sur une valeur existante déjà très liquide, cela risquait d’engendrer des conséquences indésirables sur le cours. Ce constat a conduit une structuration en deux opérations distinctes.
L’une sur le marché de blocs, l’autre sous forme d’offre publique de vente sur le marché central.
A ce titre, tous les investisseurs marocains sans exception ont été consultés sur leur demande. Les ordres récoltées, l’allocation a été faite par pondération. Donc, le RCAR et la CMR auraient tout simplement demandé plus que leurs confrères !
Et notre interlocuteur de préciser que « c’est normal, du fait de leur poids en termes d’actifs sous gestion ».
Il apparait que les caisses de retraites de l’État sont très importantes en termes de taille et que donc, leurs ordres ont été beaucoup plus importants. De plus, elles sont certainement moins allouées en actions en général et détiennent moins de titres MT que les autres.
Enfin les titres MT étant assortis d’un dividende de 5 ,5%, elles en sont avides pour améliorer leur rendement de portefeuille. A bon entendeur salut !
Bien que ceux-ci n’occuperont pas pour autant de poste au Conseil de MT où les trois administrateurs marocains qui y siègent se maintiennent.
Des résultats détaillés de l’opération de blocs en termes de sur-souscription, de taux d’allocation global et de satisfaction de chacun des institutionnels par rapport à sa demande auraient été des plus convaincants par rapport à la grande part attribuée à la CMR et au RCAR !
D’après nos informations, le taux d’allocation est identique pour tous les institutionnels souscripteurs, ce qui signifie que la proportionnalité n’a pas été appliquée.
Par ailleurs, il faut savoir que les opérations de blocs quotidiennes ne donnent pas les vendeur et acheteur, mais seulement le volume et le cours.
C’est peut-être l’une des raisons pour laquelle les quantités allouées aux différents institutionnels ne sont pas connues, d’autant que les intervenants de cette opération ne voudraient pas dévoiler la composition de leurs portefeuilles, sur laquelle ils observent une grande discrétion.
Par contre, après le règlement livraison, ceux qui franchiront le seuil de 3% (règle pout MT) devront l’annoncer.
C’est d’ailleurs ce qui vient d’être fait par le biais d’un communiqué de l’AMMC annonçant que le RCAR a franchi le seuil de 5% au capital de MT. (cf.voir infra communiqué de l’AMMC).
Une annonce qui devrait logiquement être suivie par une seconde, identique, concernant la CMR.
De plus, les mêmes interrogations ont pu porter sur la définition du prix de cession des 6% et 2% de Maroc Télécom, inférieur au cours de bourse.
Lors du road show qui a été fait auprès de tous les institutionnels, l’accent a été mis sur la taille de l’opération, son prix et les modalités. Certes, le cours de MT tournait au cours de l’année précédente, autour de 143 DH et 145 DH, coupon inclus de 6,8 DH.
Mais, après le détachement de celui-ci, la valeur MT est tombé à 138 DH, sachant que l’opération en question intervient juste après le règlement du dividende.
Puis la décote basée sur ce prix se situe entre 8% et 10%. Mais, pourquoi une décote pour une valeur qui figure parmi les « blue chips » de la cote ? Cette décote se justifie par la liquidité du titre qui le rend facilement accessible !
L’État, pour attirer les souscripteurs institutionnels vers l’offre de IAM sur le marché de blocs, se devait de proposer une décote d’autant que l’offre porte sur une grande quantité de titres.
Et c’est aussi le cas pour l’OVP qui dépasse les 2 milliards, soit le double de l’OPV de Marsa Maroc.
Mais, l’État n’est pas pour autant perdant, parce qu’il a encaissé, il y a juste 3 semaines, quelques 470 millions de dirhams de dividende sur les 8% de capital cédés aujourd’hui, qui s’ajoutent aux 9 milliards des opérations de cession en question.
Attijari Finance dans sa note de présentation de la privatisation de Maroc Télécom, soulève que l’introduction en bourse de MT, il y a 15 ans, qui portait sur 16% du capital à 68 DH l’action, s’était faite pour 8,4 MMDH, alors que l’actuelle cession de 8% de son capital, soit la moitié, se réalise au même prix.
C’est dire que le cours de la valeur de MT a tout simplement doublé.
Sa première privatisation par un acteur privé d’une plus grande taille qui a apporté un savoir-faire avec une forte valeur-ajoutée, y est certainement pour beaucoup !
Enfin, avec la cession de 8% du capital de MT pour 9 milliards de dirhams, une troisième question se pose:
Si cette opération est considérée comme trop élevée pour le marché boursier central et orientée pour les trois-quarts sur le marché de gros, comment le marché boursier pourrait-t-il absorber les autres privatisations prévues par la LOF 2019 ?
Dans quelle mesure les privatisations peuvent-elles booster le marché financier s’il celui-ci est trop petit pour leur taille respective ? Certes, le marché boursier reste encore étroit, mais si l’on compare le marché marocain de 2004 à ceux de 2006, 2007 et 2008, années qui ont suivi l’OPV de MT, l’on peut constater que les volumes d’échanges sur le marché financier ont été multipliés par trois.
Et cette OPV a été suivie par d’autres et certaines valeurs ont par ailleurs grossi. L’actuelle opération produira aussi son effet sur l’élargissement du marché financier qui grandira encore et encore.
La taille du marché marocain au-delà de la bourse se mesure aux montants levés comme c’est le cas avec plus de 8 milliards de dirhams de l’opération en question, ce qui montre à quel point les institutionnels recherchent du papier.
Ainsi, le problème de notre marché ne porte pas sur sa profondeur, mais sur sa liquidité avec des flottants faibles.
En l’occurrence, l’actuelle opération va non seulement conforter encore plus le flottant de la valeur MT qui passe de 23 % à 31% du capital, pour une capitalisation de plus de 100 milliards de dirhams, mais aussi permettre à une demande plus diversifiée de s’orienter vers cette valeur.
Pour revenir à l’essentiel, rappelons que comme pour toute privatisation la recette de 9 milliards de dirhams sera partagée égalitairement entre la recette budgétaire et le Fonds Hassan II, un des principaux investisseurs de notre pays…
Afifa Dassouli
Déclaration de franchissement de seuil de participation FS/EM/19/2019
L’Autorité Marocaine du Marché des Capitaux (AMMC) porte à la connaissance du public que le Régime Collectif d’Allocation des Retraites (RCAR), a déclaré avoir acquis sur le marché de blocs, en date du 17 juin 2019, 16 229 447 actions Itissalat Al Maghrib au cours unitaire de 127 dirhams, franchissant ainsi à la hausse le seuil de participation de 5% dans le capital de ladite société.
Suite à cette transaction, le RCAR déclare détenir 51 060 810 actions Itissalat Al Maghrib soit 5,81% du capital de ladite société.
Dans les douze mois qui suivent le franchissement du seuil précité, le RCAR envisage de poursuivre ses achats sur la valeur Itissalat Al Maghrib.
(fin du communiqué)