Des euros sur un drapeau de l'Union européenne, à Lille, le 22 mars 2019 © AFP/Archives PHILIPPE HUGUEN
Les ministres européens des Finances réunis jeudi à Luxembourg doivent se mettre d’accord sur les grandes lignes d’un budget de la zone euro, un projet phare du président français Emmanuel Macron considérablement revu à la baisse.
Mandatés par les dirigeants européens après un sommet en décembre à Bruxelles, les ministres débattent depuis six mois de cette question qui divise les pays du Sud, partisans d’une plus grande solidarité, et ceux du Nord, adeptes de la rigueur budgétaire.
Or, la méfiance des partisans de la discipline, emmenés par les Pays-Bas, face à des Etats du Sud, jugés trop dépensiers, s’est accrue après les récentes bisbilles entre le gouvernement populiste italien, qui laisse filer son énorme dette publique, et la Commission européenne, qui le menace de sanctions.
Même si la question italienne n’est pas officiellement à l’ordre du jour de la réunion, elle pourrait jeter une ombre sur des discussions déjà compliquées.
La zone euro ne doit pas contribuer à l' »incertitude politique » déjà mise à mal par le Brexit ou les tensions commerciales, a plaidé jeudi le Portugais Mario Centeno, qui préside ces réunions ministérielles de l’Eurogroupe.
« Si nous ne prenons pas de décisions, les citoyens ne comprendront pas pourquoi nous avons de si longues réunions », a-t-il insisté.
Baptisé « instrument budgétaire pour la compétitivité et la convergence », l’embryon de budget de la zone euro a pour objectif d’encourager des réformes pour accroître la compétitivité dans les 19 pays ayant adopté la monnaie unique.
Signe des tensions persistantes, le Commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, a souligné mercredi qu’il aurait « préféré que l’on parle de budget de la zone euro, ce qui serait plus facile à comprendre ». Or, ce seul terme va déjà trop loin pour les pays du Nord, opposés au principe même d’un budget propre à la zone.
– « Bazooka » –
Son montant en tout cas devrait être bien moindre que ce qu’aurait souhaité M. Macron, qui envisageait plusieurs centaines de milliards d’euros.
Deux sources européennes à Bruxelles évoquaient mercredi une enveloppe de 17 milliards d’euros répartis sur sept ans et placés sous l’autorité élargie des 27 Etats de l’UE (moins le Royaume-Uni qui doit quitter l’Union).
Ces 27 pays doivent décider de l’ampleur de l’enveloppe dédiée au budget de la zone euro car ce dernier est incorporé dans le budget de l’UE, et les négociations se font donc avec l’ensemble des pays de l’Union.
Le montant de cet « instrument » sera arrêté lors des négociations sur le futur cadre du budget pluriannuel de l’UE pour 2021 à 2027, dans lequel il doit s’inscrire.
« On va démarrer avec un montant plutôt petit, ce ne sera pas le gros bazooka (au début, ndlr), mais il peut grossir » grâce à des revenus supplémentaires provenant de nouvelles taxes par exemple, a indiqué un haut responsable européen.
La France et l’Allemagne proposent ainsi d’établir une taxe sur les transactions financières (TTF) au niveau européen –un projet en souffrance depuis plusieurs années– qui permettrait de l’abonder.
Second point des réformes de la zone euro où les ministres des Finances doivent encore progresser jeudi: le renforcement du Mécanisme européen de stabilité (MES), créé en 2012 en pleine crise de la dette, et destiné à venir en aide aux pays en difficulté.
Troisièmement, ils doivent aussi avancer sur l’Union bancaire, lancée en 2012 après la crise financière et qui n’est pas totalement achevée.
Depuis des années, l’Allemagne traîne les pieds pour créer un système européen de garantie des dépôts (EDIS en anglais), craignant de voir ses épargnants payer pour les banques de pays du Sud, comme les italiennes. Berlin veut que soit d’abord réduit le niveau des créances douteuses des mauvais élèves avant de procéder à une mutualisation.
« Malheureusement, sur ce projet, l’impasse est toujours là », a regretté mercredi le vice-président de la Commission européenne, Valdis Dombrovskis Dombrovskis.
Toutes ces réformes sont jugées particulièrement nécessaires par Bruxelles pour affronter des crises futures qui risquent de se répandre dans toute l’Union, en raison de l’intégration étroite des économies des pays, en particulier au sein de la zone euro, qui représente 85% du PIB de l’UE à 27.
LNT avec Afp